Haïti: la démission du Premier ministre ouvre une nouvelle crise politique


Haïti: la démission du Premier ministre ouvre une nouvelle crise politique

publié le 25/02/2012 à 12:26, mis à jour à 12:26
Haïti: la démission du Premier ministre ouvre une nouvelle crise politique
afp.com/Thony Belizaire

PORT-AU-PRINCE - La démission vendredi du Premier ministre haïtien Garry Conille, quatre mois à peine après sa nomination, ouvre une nouvelle crise politique dans le pays ravagé en 2010 par un violent séisme dont il peine toujours à se remettre.

"Je me vois dans l'obligation de vous présenter ma démission comme Premier ministre du gouvernement de la République", écrit simplement, sans plus de détails, Garry Conille dans un courrier adressé au président Michel Martelly et dont l'AFP a obtenu une copie.
"J'ai accepté la démission du Premier ministre Garry Conille, mais je regrette que cette décision soit venue à un moment où le pays est en train de décoller", a déploré M. Martelly au cours d'une allocution diffusée sur internet et à la télévision publique d'Haïti à 20H00 locales (00H00 GMT samedi).
Assurant vouloir nommer "rapidement" un nouveau chef de gouvernement, M. Martelly a indiqué avoir déjà pris contact avec les présidents des deux chambres du Parlement haïtien --où il ne dispose pas d'une majorité-- afin de désigner un nouveau Premier ministre.
La démission du Premier ministre intervient après des jours de tension entre plusieurs ministres et Garry Conille, ouvertement divisés sur une enquête lancée au Sénat sur la nationalité des membres du gouvernement et visant également le président Martelly, dans un pays qui ne reconnaît pas la double nationalité.
M. Conille avait publiquement soutenu la démarche des parlementaires contre l'avis de ses ministres qui s'étaient rangés derrière la présidence en refusant de se soumettre à cette enquête.
Cette procédure avait été lancée à la suite d'accusations publiques d'un sénateur, Moïse Jean-Charles, farouche opposant du président haïtien, qui assurait que M. Martelly, 51 ans, serait détenteur des nationalités américaine et italienne.
L'annonce de la démission de M. Conille a été publiquement déplorée par le chef de la mission de la mission de stabilisation de l'ONU en Haïti (Minustah) Mariano Fernandez Amunategui, mais aussi par le Canada et par l'ambassade américaine sur place.
Saluant le travail de M. Conille, un ex-chef de cabinet de l'ancien président américain Bill Clinton, lui-même co-président de la Commission pour la reconstruction d'Haïti (CIRH), M. Fernandez a jugé que cette démission "démontr(ait) malheureusement que les déchirements ont pris le dessus sur la conciliation au détriment du pays". Il a appelé les autorités à "maintenir un climat harmonieux et propice à la stabilisation démocratique d'Haïti et à la relance économique".
Le chef de la diplomatie canadienne John Baird a quant à lui appelé les autorités à lui trouver un remplaçant "sans tarder", comme l'ambassade américaine.
Au cours de son allocution télévisée, M. Martelly a indiqué avoir donné l'assurance "aux partenaires de la communauté internationale" que les dispositions étaient prises pour "faire fonctionner l'Etat normalement".
Le pays peine toujours à se remettre du très violent séisme qui l'avait dévasté il y a un peu plus de deux ans. Une délégation du Conseil de sécurité de l'ONU, qui a effectué en février une visite de trois jours en Haïti, avait conclu que le pays faisait encore face à de nombreux défis d'ordre humanitaire, mais aussi politique.
La nomination de Garry Conille à la tête du gouvernement avait été formellement approuvée par le parlement en octobre 2011, et avait permis de mettre fin à plusieurs mois de crise politique.
M. Conille était le troisième Premier ministre désigné par Michel Martelly depuis l'entrée en fonctions en mai 2011 de cet ancien chanteur populaire, mais le premier dont la nomination avait été approuvée par les parlementaires.
Le processus de nomination d'un nouveau Premier ministre et la formation d'un gouvernement pourraient prendre plusieurs mois, d'autant que le président Michel Martelly ne dispose pas d'une majorité au Parlement contrôlé par l'opposition.